Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/109

Cette page n’a pas encore été corrigée
93
LIVRE XXXI, CHAP. XXXIV.


les filles qui dévoient succéder au fief [1], et, je crois, quelquefois les mâles, ne pussent se marier sans leur consentement ; de sorte que les contrats de mariage devinrent pour les nobles une disposition féodale et une disposition civile. Dans un acte pareil, fait sous les yeux du seigneur, on fit des dispositions pour la succession future, dans la vue que le fief pût être servi par les héritiers : aussi les seuls nobles eurent-ils d’abord la liberté de disposer des successions futures par contrat de mariage, comme l’ont remarqué Boyer [2] et Aufrerius [3].

Il est inutile de dire que le retrait lignager, fondé sur l’ancien droit des parents, qui est un mystère de notre ancienne jurisprudence françoise, que je n’ai pas le temps de développer, ne put avoir lieu à l’égard des fiefs, que lorsqu’ils devinrent perpétuels.

Italiam, Ilaliam [4] ... Je finis le traité des fiefs où la plupart des auteurs l’ont commencé [5].

  1. Suivant une ordonnance de S. Louis, de l'an 1246, pour constater les coutumes d’Anjou et du Maine, ceux qui auront le bail d’une fille héritière d’un fief, donneront assurance au seigneur qu’elle ne sera mariée quo de son consentement. (M.)
  2. [Boyer ou Boerius, jurisconsulte français du XVIe siècle.] Décis. 155, n° 8 ; et 204 n° 38. (M.)
  3. [Aufrerius a commenté le style du parlement de Toulouse.] In Capel. Thol., décision 453. (V.)
  4. Enéide, liv. III, vers 523. (M.)
  5. Lorsque Montesquieu proclama hautement ce précepte, passé maintenant à l’état d’axiome, qu’il faut éclairer l’histoire par les lois, et les lois par l’histoire, il ouvrit un nouvel horizon à la science. Quand il dit eu achevant son ouvrage : Je finis le traité des fiefs où la plupart des auteurs l'ont commencé, il donne le premier exemple de l’application et de l’opportunité de sa doctrine. En faisant cette remarque, Montesquieu ne se bornait pas à une question de chronologie. Il savait que ces matières n’avaient jamais été traitées par aucun jurisconsulte avec la méthode historique qu’il venait d’adopter, et il voulait fixer la date de cette heureuse innovation. Personne n’osera lui en contester le droit. (SCLOPIS.)
    _____________