Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t6.djvu/100

Cette page n’a pas encore été corrigée
84
DE L’ESPRIT DES LOIS.


et de Paris arrêtoient ces brigands [1] ; et ils ne pouvoient avancer ni sur la Seine ni sur la Loire. Hugues Capet, qui possédoit ces deux villes, tenoit dans ses mains les deux clefs des malheureux restes du royaume ; on lui déféra une couronne qu’il étoit seul en état de défendre. C’est ainsi que depuis on a donné l’Empire à la maison qui tient immobiles les frontières des Turcs [2].

L’Empire étoit sorti de la maison de Charlemagne dans le temps que l’hérédité des fiefs ne s’établissoit que comme une condescendance. Elle fut même plus tard en usage [3] chez les Allemands que chez les François [4] : cela fît que l’Empire, considéré comme un fief, fut électif. Au contraire, quand la couronne de France sortit de la maison de Charlemagne, les fiefs éioient réellement héréditaires dans ce royaume : la couronne, comme un grand fief, le fut aussi.

Du reste, on a eu grand tort de rejeter sur le moment de cette révolution tous les changements qui étoient arrivés, ou qui arrivèrent depuis. Tout se réduisit à deux événements ; la famille régnante changea, et la couronne fut unie à un grand fief.

  1. Voyez le capitulaire de Charles le Chauve, de l’an 877, apud Carisiacum, sur l’importance de Paris, de Saint-Denis, et des châteaux sur la Loire, dans ces temps-là. (M.)
  2. La maison d’Autriche.
  3. A. B. Il paroît même qu’elle s’établit plus tard chez les Allemands que chez les François.
  4. Voyez ci-devant le ch. XXX. (M.)
    _____________