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CHAPITRE VII.


DU CRIME DE LÈSE-MAJESTÉ.


Les lois de la Chine décident que quiconque manque de respect à l’empereur doit être puni de mort. Comme elles ne définissent pas ce que c’est que ce manquement de respect, tout peut fournir un prétexte pour ôter la vie à qui l’on veut, et exterminer la famille que l’on veut.

Deux personnes chargées de faire la gazette de la cour, ayant mis dans quelque fait des circonstances qui ne se trouvèrent pas vraies, on dit que mentir dans une gazette de la cour, c’était manquer de respect à la cour ; et on les fit mourir [1]. Un prince du sang ayant mis quelque note par mégarde sur un mémorial signé du pinceau rouge par l’empereur, on décida qu’il avoit manqué de respect à l’empereur, ce qui causa contre cette famille une des terribles persécutions dont l’histoire ait jamais parlé [2].

C’est assez que le crime de lèse-majesté soit vague, pour que le gouvernement dégénère en despotisme. Je m’étendrai davantage là-dessus dans le livre de la composition des lois [3].

  1. Le P. du Halde, t. I, p. 43. (M.) — A la Chine, c’est un crime de lèse-majesté pour ceux qui sont chargeas de faire la gazette de la cour, que d’y rien ajouter ou diminuer, et surtout d’y insérer des choses fausses, parce qu’on n’imprime rien dans cette gazette qui n'ait été présenté et approuvé par l’Empereur, ou qui ne vienne de lui directement. (DUPIN.)
  2. Lettres du P. Parennin, dans les Lettres édifiantes. (M.)
  3. Inf., liv. XXIX.