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CHAPITRE IV.


QUE LA LIBERTÉ EST FAVORISÉE PAR LA NATURE
DES PEINES ET LEUR PROPORTION.


C’est le triomphe de la liberté, lorsque les lois criminelles tirent chaque peine de la nature particulière du crime. Tout l’arbitraire cesse ; la peine ne descend point du caprice du législateur, mais de la nature de la chose ; et ce n’est point l’homme qui fait violence à l’homme.

Il y a quatre sortes de crimes : ceux de la première espèce choquent la religion ; ceux de la seconde, les mœurs ; ceux de la troisième, la tranquillité ; ceux de la quatrième, la sûreté des citoyens. Les peines que l’on inflige doivent dériver de la nature de chacune de ces espèces.

Je ne mets dans la classe des crimes qui intéressent la religion que ceux qui l’attaquent directement, comme sont tous les sacrilèges simples [1]. Car les crimes qui en troublent l’exercice sont de la nature de ceux qui choquent la tranquillité des citoyens ou leur sûreté, et doivent être renvoyés à ces classes.

Pour que la peine des sacrilèges simples soit tirée de la nature [2] de la chose, elle doit consister dans la privation

  1. C’est-à-dire les délits purement religieux, sans mélange d’insultes, de violence, de voies de fait, etc.
  2. Saint Louis fit des lois si outrées contre ceux qui juroient, que le pape se crut obligé de l'en avertir. Ce prince modéra son zèle et adoucit ses lois. Voyez ses ordonnances. (M.)