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CHAPITRE XVII


DE LA PUISSANCE EXÉCUTRICE DANS LA MÊME
RÉPUBLIQUE.


Si le peuple fut jaloux de sa puissance législative, il le fut moins de sa puissance exécutrice. Il la laissa presque tout entière au sénat et aux consuls ; et il ne se réserva guère que le droit d’élire les magistrats, et de confirmer les actes du sénat et des généraux. Rome, dont la passion étoit de commander, dont l’ambition étoit de tout soumettre, qui avoit toujours usurpé, qui usurpoit encore, avoit continuellement de grandes affaires ; ses ennemis conjuroient contre elle, ou elle conjuroit contre ses ennemis.

Obligée de se conduire, d’un côté, avec un courage béroîque, et de l’autre avec une sagesse consommée, l’état des choses demandoit que le sénat eût la direction des affaires. Le peuple disputoit au sénat toutes les branches de la puissance législative, parce qu’il étoit jaloux de sa liberté ; il ne lui disputoit point les branches de la puissance exécutrice, parce qu’il étoit jaloux de sa gloire. La part que le sénat prenoit à la puissance exécutrice étoit si grande, que Polybe [1] dit que les étrangers pen-

  1. Liv. VI. (M.) Tout ceci est pris des considérations de Polybe sur la distribution des pouvoirs dans la république romaine. Hist., liv. VI, chap. IX-XII.