jours de navigation, et il fut obligé de revenir faute de
vivres. Il paroit que les Carthaginois ne firent aucun usage
de cette entreprise d’Hannon. Scylax
[1] dit qu’au delà de
Cerné la mer n'est pas navigable
[2], parce qu’elle y est basse, pleine de limon et d’herbes marines : eflectivement
il y en a beaucoup dans ces parages
[3]. Les marchands
carthaginois dont parle Scylax pouvoient trouver des
obstacles qu’Hannon, qui avoit soixante navires de cinquante
rames chacun, avoit vaincus. Les difficultés sont
relatives ; et de plus, on ne doit pas confondre une entreprise
qui a la hardiesse et la témérité pour objet, avec ce
qui est l’effet
[4] d’une conduite ordinaire.
C’est un beau morceau de l’antiquité que la relation d’Hannon : le même homme qui a exécuté, a écrit ; il ne met aucune ostentation dans ses récits. Les grands capitaines écrivent leurs actions avec simplicité, parce qu’ils sont plus glorieux de ce qu’ils ont fait que de ce qu’ils ont dit.
Les choses sont comme le style. Il ne donne point dans le merveilleux : tout ce qu’il dit du climat, du terrain, des mœurs, des manières des habitants, se rapporte à ce qu’on voit aujourd’hui dans cette côte d’Afrique ; il semble que c’est le journal d’un de nos navigateurs.
Hannon remarqua [5] sur sa flotte que le jour il régnoit
- ↑ Voyez son Périple, article de Carthage. (M.)
- ↑ Voyez Hérodote, in Melpomene, IV, XLIII, sur les obstacles que Sataspe trouva. (M).
- ↑ Voyez les cartes et les relations, le premier volume des Voyages qui ont servi à l’établissement de la compagnie des Indes, part. I, p. 201. Cette herbe couvre tellement la surface de la mer, qu’on a de la peine à voir l'eau ; et les vaisseaux ne peuvent passer à travers que par un vent frais. (M.)
- ↑ A. B. avec les choses d'une conduite ordinaire.
- ↑ Pline, H, N, V, I, nous dit la même chose en parlant du mont Atlas :