Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/440

Cette page n’a pas encore été corrigée
424
DE L’ESPRIT DES LOIS.


loin que Séleucus et Alexandre. Quand il seroit vrai [1] qu’ils n’auroient pas été plus loin vers l’orient que Séleucus, ils allèrent plus loin vers le midi : ils découvrirent [2] Siger et des ports dans le Malabar [3], qui donnèrent lieu à la navigation dont je vais parler.

Pline [4] nous apprend qu’on prit successivement trois routes pour faire la navigation des Indes. D’abord, on alla, du promontoire de Siagre, à l’île de Patalène, qui est à l’embouchure de l’Indus : on voit que c’étoit la route qu’avoit tenue la flotte d’Alexandre. On prit ensuite un chemin plus court [5] et plus sûr ; et on alla du même promontoire à Siger. Ce Siger ne peut être que le royaume de Siger dont parle Strabon [6], que les rois grecs de Bactriane découvrirent. Pline ne peut dire que ce chemin fut plus court, que parce qu’on le faisoit en moins de temps ; car Siger devoit être plus reculé que l’Indus, puisque les rois de Bactriane le découvrirent. Il falloit donc que l’on évitât par là le détour de certaines côtes, et que l’on profitât de certains vents. Enfin les marchands prirent une troisième route : ils serendoient à Canes ou à Océlis, ports situés à l’embouchure de la mer Bouge, d’où, par un vent d’ouest, on arrivoit à Muziris, première étape des Indes, et de là à d’autres ports [7].

On voit qu’au lieu d’aller de l’embouchure de la mer Rouge jusqu’à Siagre, en rémontant la côte de l’Arabie

  1. A. B. Je crois bien qu’ils n’allèrent pas plus loin vers l'orient, et ne passèrent point le Gange ; mais ils allèrent plus loin vers le midi, etc.
  2. Appollonius Adramittin, dans Strabon, liv. XI. (M.)
  3. A. Des ports dans le Gusarat et le Malabar.
  4. Liv. VI, c. XXIII. (M.)
  5. Pline, liv. VI, ch. XXIII. (M.)
  6. Liv. XI, Sigertidis regnum. (M.)
  7. Cette dernière phrase ainsi que le paragraphe suivant parut pour la première fois dans B.