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DE L’ESPRIT DES LOIS.


que l’on soit, il faut faire sa fortune ; mais qu'il est honteux d’augmenter son bien, si on ne commence par le dissiper [1] ; cette partie de la nation, qui sert toujours avec le capital de son bien ; qui, quand elle est ruinée, donne sa place à une autre qui servira avec son capital encore ; qui va à la guerre pour que personne n’ose dire qu’elle n’y a pas été ; qui, quand elle ne peut espérer les richesses, espère les honneurs, et lorsqu’elle ne les obtient pas, se console, parce qu’elle a acquis de l’honneur [2] : toutes ces choses ont nécessairement contribué à la grandeur de ce royaume. Et si, depuis deux ou trois siècles, il a augmenté sans cesse sa puissance, il faut attribuer cela à la bonté de ses lois, non pas à là fortune, qui n’a pas ces sortes de constance.

  1. Au service militaire.
  2. Sup. IV, II. Comparez ce que l'auteur dit des courtisans, au liv. III, C. V.
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