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CHAPITRE XXII.


RÉFLEXION PARTICULIÈRE.


Des gens [1] frappés de ce qui se pratique dans quelques États, peisent qu’il faudroit qu’en France il y eût des lois qui engageassent les nobles à faire le commerce. Ce seroit le moyen d’y détruire la noblesse, sans aucune utilité pour le commerce. La pratique de ce pays est tressage : les négociants n’y sont pas nobles, mais ils peuvent le devenir [2]. Ils ont l’espérance d’obtenir la noblesse, sans en avoir l’inconvénient actuel. Ils n’ont pas de moyen plus sûr de sortir de leur profession que de la bien faire, ou de la faire avec honneur [3] ; chose qui est ordinairement attachée à la suffisance [4]

Les lois qui ordonnent que chacun reste dans sa profession, et la fasse passer à ses enfants, ne sont et ne

  1. C’est une allusion aux projets de l'abbé de Saint-Pierre. (Rêves d'un homme de bien, p. 195 et suiv). L'abbé avait cent fois raison contre le Président.
  2. Ce dernier point ne rend pas la profession du commerce beaucoup plus honorable {Extrait du Livre de l'Esprit des Lois, p. 26). — Dans la monarchie, chacun fait le commerce afin de pouvoir le quitter ; au lieu que dans les républiques on ne l’entreprend que dans l’espérance de le continuer et do l’augmenter. (RISTEAU.)
  3. A. B. Ou de la faire avec bonheur. (N’est-ce pas la vraie leçon ?)
  4. Suffisance est synonyme de capacité dans la langue de Montesquieu, — Inf. XXI — comme dans celle de Montaigne.