Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/384

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE V.


DES PEUPLES QUI ONT FAIT LE COMMERCE
D'ÉCONOMIE.


Marseille, retraite nécessaire au milieu d’une mer orageuse ; Marseille, ce lieu où les vents, les bancs de la mer, la disposition des côtes ordonnent de toucher, fut fréquentée par les gens de mer. La stérilité [1] de son territoire détermina ses citoyens au commerce d’économie. Il fallut qu’ils fussent laborieux, pour suppléer à la nature qui se refusoit ; qu’ils fussent justes, pour vivre parmi les nations barbares qui dévoient faire leur prospérité ; qu’ils fussent modérés, pour que leur gouvernement fût toujours tranquille ; enfin qu’ils eussent des mœurs frugales, pour qu’ils pussent toujours vivre d’un commerce qu’ils conserveroient plus sûrement lorsqu’il seroit moins avantageux.

On a vu partout la violence et la vexation donner naissance au commerce d’économie, lorsque les hommes sont contraints de se réfugier dans les marais, dans les lies, les bas fonds de la mer, et ses écueils même. C’est ainsi que Tyr, Venise, et les villes de Hollande furent fondées ; les fugitifs y trouvèrent leur sûreté. Il fallut subsister ; ils tirèrent leur subsistance de tout l’univers.

  1. Justin, liv. XLIII, C. III. (M.)
    ______________