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QUATRIÈME PARTIE.

LIVRE VINGTIÈME.


DES LOIS
DANS LE RAPPORT QU’ELLES ONT AVEC LE COMMERCE
CONSIDÉRÉ DANS SA NATURE
ET SES DISTINCTIONS.
________


INVOCATION AUX MUSES [1].


Vierges du mont Piérie, entendez-vous le nom que je vous donne ? Inspirez-moi. Je cours une longue carrière ;

  1. Dans les éditions de l'Esprit des lois, publiées du vivant de Montesquieu, il y avait deux parties, et cette invocation devait figurer en tète de la seconde partie qui commençait au XXe livre. Mais Jacob Vernet, de Genève, qui s'était chargé de revoir les épreuves de l'Esprit des lois, et qui eut plus d'une fois la maladresse de corriger Montesquieu, trouva que cette invocation serait déplacée, et engagea l'auteur à la supprimer.

    Montesquieu lui répondit : « A l'égard de l’Invocation aux Muses, elle a contre elle que c'est une chose singulière dans cet ouvrage et qu'on n’a point encore faite ; mais quand une chose singulière est bonne en elle-même, il ne faut pas la rejeter pour la singularité qui devient elle-même une raison de succès ; et il n'y a point d’ouvrage où il faille plus songer à délasser le lecteur que dans celui-ci, à cause de la longueur et de la pesanteur des matières. »

    La raison était bonne ; cependant Montesquieu se résigna à écouter son Aristarque, et il lui écrivit quelques jours après : «  J’ai été incertain au sujet de l’Invocation, entre un de mes amis qui voulait qu’on la laissât, et