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CHAPITRE XVI.


COMMENT QUELQUES LÉGISLATEURS ONT CONFONDU
LES PRINCIPES QUI GOUVERNENT LES HOMMES[1].


Les mœurs et les manières sont des usages que les lois n’ont point établis, ou n’ont pas pu, ou n’ont pas voulu établir.

II y a cette différence entre les lois et les mœurs, que les lois règlent plus les actions du citoyen, et que les mœurs règlent plus les actions de l'homme [2]. Il y a cette différence entre les mœurs et les manières, que les premières regardent plus la conduite intérieure, les autres l'extérieure.

Quelquefois, dans un État, ces choses [3] se confondent. Lycurgue fit un même code pour les lois, les mœurs et

  1. Montesquieu prête au législateur des intentions quiil n’a pas eues, et lui attribue un pouvoir qui ne lui appartient pas. Chez les peuples primitifs, le droit fait partie de la religion, et ne se distingue pas de la morale. La coutume embrasse toute la vie du citoyen. Aujourd'hui nons distinguons entre la loi qui ne concerne que les actes dont les tiers peuvent souffrir, et la morale ou la religion qui ne regarde que l'homme intérieur ; mais c'est chose toute moderne. Les Spartiates n’y pouvaient pas plus songer que les vieux Romains. Tant que l'Église catholique a été un des grands pouvoirs de l'État, elle n'a pas reconnu davantage cette distinction.
  2. A. Il n y a cette différence entre les lois et los mœurs, que les lois règlent plus les actions de l'homme. Il y a cette différence entre les mœurs et les manières, etc.
  3. Moïse fit un même code pour les lois et la religion. Les premiers Romains confondirent les coutumes anciennes avec les lois. (M.)