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DE L'ESPRIT DES LOIS.


taire la loi ; et il falloit bien que ces sortes de rappels fussent communs, puisqu’on en fit des formules [1].

Parmi toutes ces formules, j’en trouve une singulière [2]. Un aïeul rappelle ses petits-enfants pour succéder avec ses fils et avec ses filles. Que devenoit donc la loi salique ? II falloit que, dans ces temps-là même, elle ne fût plus observée ; ou que l’usage continuel de rappeler les filles eût fait regarder leur capacité de succéder comme le cas le plus ordinaire.

La loi salique n’ayant point pour objet une certaine préférence d’un sexe sur un autre, elle avoit encore moins celui d’une perpétuité de famille, de nom, ou de transmission de terre : tout cela n’entroit point dans la tète des Germains. C’étoit une loi purement économique, qui donnoit la maison, et la terre dépendante de la maison, aux mâles qui dévoient l’habiter, et à qui, par conséquent, elle convenoit le mieux.

Il n’y a qu’à transcrire ici le titre des Aleux de la loi salique, ce texte si fameux, dont tant de gens ont parlé, et que si peu de gens ont lu.

1° « Si un homme meurt sans enfants, son père ou sa mère lui succéderont. 2° S’il n’a ni père ni mère, son sœur, la sœur de sa mère lui succédera. 4° Si sa mère n’a point de sœur, la sœur de son père lui succédera [3]. 5° Si son père n’a point de sœur, le plus proche parent par mâle lui succédera. 6° Aucune portion [4] de la terre salique

  1. Voyez Marculfe, liv. II, form, 10 et 12 ; l'Appendice de Marculfe, form, 40, et les formules anciennes, appelées de Sirmond, form, 22. (M.)
  2. Form. 55, dans le recueil de Lindembroch. (M )
  3. Dans le texte publié par Baluzo, ce sont les sœurs du père qui saocèdent avant les sœurs de la mère.
  4. De terra vero salicà in mulierem nulla portio hereditatis transit,