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LIVRE XVIII, CHAP. XXII.


peuvent souffrir que leurs maisons se touchent les unes les autres ; chacun laisse autour de sa maison un petit terrain ou espace, qui est clos et fermé. » Tacite parloit exactement. Car plusieurs lois des codes [1] barbares ont des dispositions différentes contre ceux qui renversoient cette enceinte» et ceux qui pénétroient dans la maison même.

Nous savons, par Tacite et César, que les terres que les Germains cultivoient, ne leur étoient données que pour un an ; après quoi elles redevenoient publiques. Us n’avoient de patrimoine que la maison, et un morceau de terre dans Tenceinte autour de la maison [2]. C’est ce patrimoine particulier qui appartenoit aux mâles. En effet, pourquoi auroit-il appartenu aux filles ? Elles passoient dans une autre maison.

La terre salique étoit donc cette enceinte qui dépendoit de la maison du germain ; c’étoit la seule propriété qu’il eût. Les Francs, après la conquête, acquirent de nouvelles, propriétés, et on continua à les appeler des terres saliques.

Lorsque les Francs vivoient dans la Germanie, leurs biens étoient des esclaves, des troupeaux, des chevaux, des armes, etc. La maison , et la petite portion de terre qui y étoit jointe, étoient naturellement données aux enfants mâles qui dévoient y habiter. Mais, lorsqu’après la conquête, les Francs eurent acquis de grandes terres, on trouva dur que les filles et leurs enfants ne pussent y avoir de part. Il s’introduisit un usage, qui permettoit au père de rappeler sa fille et les enfants de sa fille. On fit

  1. La loi des Allemands, chap. X, et la loi des Bavarois, tit. X, § 1 et 2.
  2. Cette enceinte s’appelle curtis dans les Chartres. (M.)