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CHAPITRE XV.


DES PEUPLES QUI CONNOISSENT L’USAGE
DE LA MONNOIE.


Aristippe, ayant fait naufrage, nagea et aborda [1] au rivage prochain ; il vit qu’on avoit tracé sur le sable des figures de géométrie : il se sentit ému de joie, jugeant qu’il étoit arrivé chez un peuple grec, et non pas chez un peuple barbare [2].

Soyez seul, et arrivez par quelque accident chez un peuple inconnu ; si vous voyez une pièce de monnoie, comptez que vous êtes arrivé chez une nation policée.

La culture des terres demande l’usage de la monnoie. Cette culture suppose beaucoup d’arts et de connoissances ; et l’on voit toujours marcher d’un pas égal les arts, les connoissances et les besoins. Tout cela conduit à l’établissement d’un signe de valeurs [3].

Les torrents et les incendies [4] nous ont fait découvrir que les terres contenoient des métaux [5]. Quand ils en ont été une fois séparés, il a été aisé de les employer.

  1. A. B. nagea et arriva au rivage prochain.
  2. Cic, de Rep., liv. I, ch. XVII. On a fait la même histoire du philosophe qui, en arrivant sur une terre inconnue, y vit un pendu. Le supplice supposait une justice organisée, par conséquent un peuple civilisé.
  3. Inf., XXII, II.
  4. C’est ainsi que Diodore, liv. V, ch. XXXV, nous dit que les bergers trouvèrent l'or des Pyrénées. (M.)
  5. A. B. Nous ont fait découvrir que les métaux étoient dans les terres.