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CHAPITRE VII.


DES OUVRAGES DES HOMMES.


Les hommes, par leurs soins et par de bonnes lois, ont rendu la terre plus propre à être leur demeure. Nous voyons couler les rivières là où étoient des lacs et des marais ; c’est un bien que la nature n’a point fait, mais qui est entretenu par la nature. Lorsque les Perses [1] étoient les maîtres de l’Asie, ils permettoient à ceux qui amëneroient de l’eau de fontaine en quelque lieu qui n’auroit point été encore arrosé, d’en jouir pendant cinq générations ; et comme il sort quantité de ruisseaux du mont Taurus, ils n’épargnèrent aucune dépense pour en faire venir de l’eau. Aujourd’hui, sans savoir d'où elle peut venir, on la trouve dans ses champs et dans ses jardins.

Ainsi, comme les nations destructrices font des maux qui durent plus qu’elles, il y a des nations industrieuses qui font des biens qui ne finissent pas même avec elles [2].

  1. Polybe, liv. X, ch. xxv. (M.)
  2. C'est ce qu’on peut dire des Arabes d’Espagne qui laissèrent après eux tout un système d'irrigation qui fait encore aujourd’hui la fortune de Valence, de Grenade et de Murcie.
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