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LIVRE DIX-HUITTÈME.

DES LOIS DANS LE RAPPORT QU’ELLES ONT
AVEC LA NATURE DU TERRAIN [1].
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CHAPITRE PREMIER.

COMMENT LA NATURE DU TERRAIN INFLUE
SUR LES LOIS.


La bonté des terres d’un pays y établit naturellement la dépendance. Les gens de la campagne, qui y font la principale partie du peuple, ne sont pas si jaloux de leur liberté ; ils sont trop occupés et trop pleins de leurs affaires particulières [2]. Une campagne qui regorge de biens craint le pillage, elle craint une armée. « Qui est-ce qui forme le bon parti, disoit Cicéron à Atticus [3] ? Seront-ce

  1. Ce livre aurait pu être intitulé : Des lois dans le rapport qu'elles ont avec la culture des terres, car l'auteur en parle beaucoup plus que de celles qui ont rapport à la nature du terrain. (Extrait du livre De l’Esprit des lois, p. 96.)
  2. L’humble fortune de l'homme des champs ne lui permet pas de rester oisif et ne lui laisse guère le temps d’assister fréquemment aux assemblées. Forcé de se procurer le nécessaire, il est tout à sa chose, et ne veut point de distractions étrangères. Il préfère ses travaux champêtres au plaisir de commander et de gouverner ; et si les emplois ne sont pas lucratifs, il aime mieux le profit que l’honneur. ARISTOTE, Politique, liv. VI, ch. IV.
  3. Liv. VII, VII. (M.) — An fœneratores? an agricolas? Quibus optatissimum est otium. Nisi eos timere putas, ne sub regno sint, qui id nunquam, dum modo otiosi essent, recusarunt.