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DE L’ESPRIT DES LOIS.


rendit odieux au peuple [1]. Il faut connoître le génie du peuple romain pour découvrir la vraie cause de la haine qu’il conçut pour Carvilius. Ce n’est point parce que Carvilius répudia sa femme qu’il tomba dans la disgrâce du peuple : c’est une chose dont le peuple ne s’embarrassoit pas [2]. Mais Carvilius avoit fait un serment aux censeurs, qu’attendu la stérilité de sa femme, il la répudieroit pour donner des enfants à la république. C’étoit un joug que le peuple voyoit que les censeurs alloient mettre sur lui. Je ferai voir, dans la suite [3] de cet ouvrage, les répugnances qu’il eut toujours pour des règlements pareils [4]. Mais d’où peut venir une telle contradiction entre ces auteurs ? Le voici : Plutarque a examiné un fait, et les autres ont raconté une merveille [5].

  1. M. de Montesquieu dit d’une part que ce divorce est antérieur de soixante-douze ans à la loi des Douze Tables, et de l'autre il suppose que les censeurs intervinrent dans cette affaire. Or, avant la loi des Douze Tables, il n’y avait point de censeurs ; l'époque de leur création est postérieure de quelques années aux décemvirs. (CRÉVIER.)
  2. Valère Maxime, Liv. II, ch. ii, dit que les Romains le blâmèrent : Quia nec cupididatem quidem liberorum conjugali fidei prœponi debuisse arbitrabantur.
  3. Au liv. XXIII, chap. XXI. (M.)
  4. A. B. Pour des règlements pareils. Il faut expliquer les lois par les lois, et l'histoire par l’histoire.

    On comprend que Montesquieu ait effacé cette dernière phrase ; elle est en contradiction avec une autre maxime (liv. XXXI, ch. II, à la fin), qui est la clef même de l'Esprit des lois.

  5. Ces deux dernières phrases manquent dans A. B.
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