Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/241

Cette page n’a pas encore été corrigée

CHAPITRE XI.


DE LA SERVITUDE DOMESTIQUE INDÉPENDANTE
DE LA POLYGAMIE.


Ce n’est pas seulement la pluralité des femmes qu exige leur clôture dans de certains lieux d’Orient ; c’est le climat. Ceux qui liront les horreurs, les crimes, les perfidies, les noirceurs, les poisons, les assassinats, que la liberté des femmes fait faire à Goa et dans les établissements des Portugais dans les Indes, où la religion ne permet qu’une femme, et qui les compareront à l’innocence et à la pureté des mœurs des femmes de Turquie, de Perse, du Mogol, de la Chine et du Japon, verront bien qu’il est souvent aussi nécessaire de les séparer des hommes, lorsqu’on en a qu’une, que quand on en a plusieurs.

C’est le climat qui doit décider de ces choses [1]. Que serviroit d’enfermer les femmes dans nos pays du Nord, où leurs mœurs sont naturellement bonnes ; où toutes leurs passons sont calmes, peu actives, peu raffinées ; où l’amour a sur le cœur un empire si réglé, que la moindre police suffit pour les conduire ?

  1. On ne voit pas que les Anglaises aux Indes aient rien perdu de leur dignité ni de leur vertu. Il n’est donc pas exact de dire que le climat exige la clôture des femmes en Orient. On pourrait tout aussi bien voir dans leurs désordres un effet de la race, des mœurs ou de la religion.