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CHAPITRE XVIII.


DES AFFRANCHISSEMENTS.


On sent bien que quand, dans le gouvernement républicain, on a beaucoup d’esclaves, il faut en affranchir beaucoup. Le mal est que, si on a trop d’esclaves, ils ne peuvent être contenus ; si l'on a trop d’affranchis, ils ne peuvent pas vivre, et ils deviennent à charge à la république : outre que celle-ci peut être également en danger de la part d’un trop grand nombre d’affranchis et de la part d’un trop grand nombre d’esclaves. Il faut donc que les lois aient l’œil sur ces deux inconvénients.

Les diverses lois et les sénatus-consultes qu’on fit à Rome pour et contre les esclaves, tantôt pour gêner, tantôt pour faciliter les affranchissements, font bien voir l’embarras où l’on se trouva [1] à cet égard. Il y eut même des temps où l’on n’osa pas faire des lois. Lorsque, sous Néron [2], on demanda au sénat qu’il fût permis aux patrons de remettre en servitude les affranchis ingrats, l’empereur écrivit qu’il falloit juger les affaires particulières, et ne rien statuer de général.

Je ne saurois guère dire quels sont les règlements qu’une bonne république doit faire là-dessus ; cela dépend trop des circonstances. Voici quelques réflexions.

  1. A. B. Où l'on se trouvoit.
  2. Tacite, Annales, liv. XIII, c. XXVII. (M.)