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CHAPITRE X.


DIVERSES ESPÈCES D'ESCLAVAGE.


Il y a deux sortes de servitude : la réelle et la personnelle. La réelle est celle qui attache l’esclave au fonds de terre [1] C’est ainsi qu’étoient les esclaves chez les Germains, au rapport de Tacite [2]. Ils n’avoient point d’office dans la maison ; ils rendoient à leur maître une certaine quantité de bled, de bétail, ou d’étoffe : l’objet de leur esclavage n’alloit pas plus loin. Cette espèce de servitude est encore établie en Hongrie, en Bohème et dans plusieurs endroits de la basse Allemagne.

La servitude personnelle regarde le ministère de la maison, et se rapporte plus à la personne du maître.

L’abus extrême de l’esclavage est lorsqu’il est, en même temps, personnel et réel. Telle étoit la servitude des Ilotes [3] chez les Lacédémoniens ; ils étoient soumis à tous les travaux hors de la maison, et à toutes sortes d’insultes dans la maison : cette ilotie est contre la nature des choses. Les peuples simples n’ont qu’un esclavage réel [4], parce que leurs femmes et leurs enfants font les travaux

  1. C'est ce qu'on appelle le servage.
  2. De moribus German., c. XXV. (M.)
  3. A. dit partout : Elotes et Elotie.
  4. Vous ne pourriez, dit Tacite, Sur les mœurs des Germains, c. XX distinguer le maître de l'esclave, par les délices de la vie. (M.)