Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/188

Cette page n’a pas encore été corrigée


CHAPITRE XV.


DE LA DIFFÉRENTE CONFIANCE
QUE LES LOIS ONT DANS LE PEUPLE SELON LES CLIMATS.


Le peuple japonois a un caractère si atroce [1], que ses législateurs et ses magistrats n’ont pu avoir aucune confiance en lui : ils ne lui ont mis devant les yeux que des juges, des menaces et des châtiments ; ils l’ont soumis, pour chaque démarche, à l’inquisition de la police. Ces lois qui, sur cinq chefs de famille, en établissent un comme magistrat sur les quatre autres ; ces lois qui, pour un seul crime, punissent toute une famille ou tout un quartier ; ces lois, qui ne trouvent point d’innocents là où il peut y avoir un coupable, sont faites pour que tous les hommes se méfient les uns des autres, pour que chacun recherche la conduite de chacun, et qu’il en soit l’inspecteur, le témoin et le juge.

Le peuple des Indes au contraire est doux [2], tendre, compatissant : aussi ses législateurs ont-ils eu une grande confiance en lui. Ils ont établi peu [3] de peines, et elles sont peu sévères ; elles ne sont pas même rigoureusement exé

  1. Sup., VI, XIII ; XII, XIV.
  2. Voyez Bernier, t. II, p. 140. (M.)
  3. Voyez dans le quatorzième recueil des Lettres édifiantes, p. 403, les principales lois ou coutumes des peuples de l'Inde de la presqu'île deçà le Gange. (M.)