Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t4.djvu/181

Cette page n’a pas encore été corrigée
165
LIVRE XIV, CHAP. XI.

La peste est un mal dont les ravages sont encore plus prompts et plus rapides. Son siége principal est en Égypte, d’où elle se répand par tout l’univers. On a fait, dans la plupart des États de l’Europe, de très-bons règlements pour l’empêcher d'y pénétrer; et on a imaginé de nos jours un moyen admirable de l’arrêter : on forme une ligne de troupes autour du pays infecté, qui empêche toute communication [1].

Les Turcs [2], qui n'ont à cet égard aucune police, voient les chrétiens dans la même ville échapper au danger, et eux seuls périr. Ils achètent les habits des pestiférés, s'en vétissent, et vont leur train. La doctrine d’un destin rigide qui règle tout, fait du magistrat un spectateur tranquille : il pense que Dieu a déjà tout fait, et que lui n’a rien à faire.

  1. On est moins conf‍iant aujourd'hui dans l’effet des cordons sanitaires.
  2. Bicaut, De l'empire ottoman [édit. de 1678, in-12], p. 284. (M.)
    ____________