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CHAPITRE XIV.


QUE LA NATURE DES TRIBUTS EST RELATIVE
AU GOUVERNEMENT.


L’impôt par tête est plus naturel à la servitude ; l’impôt sur les marchandises est plus naturel à la liberté, parce qu’il se rapporte d’une manière moins directe à la personne.

Il est naturel [1] au gouvernement despotique que le prince ne donne point d’argent à sa milice, ou aux gens de sa cour, mais qu’il leur distribue des terres, et par conséquent qu’on y lève peu de tributs. Que si le prince donne de l’argent, le tribut le plus naturel qu’il puisse lever est un tribut par tête. Ce tribut ne peut être que très-modique, car, comme on n’y peut pas faire diverses classes de contribuables [2], à cause des abus qui en résulteroient, vu l’injustice et la violence du gouvernement, il faut nécessairement se régler sur le taux de ce que peuvent payer les plus misérables.

Le tribut naturel au gouvernement modéré est l’impôt sur les marchandises. Cet impôt étant réellement payé par

  1. Traduisez : il est d’usage dans les gouvernements despotiques que nous connaissons, etc.
  2. Édit. de 1758 : Diverses classes considérables, ce que je regarde comme une faute d’impression.