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CHAPITRE XXX.


CONTINUATION DU MÊME SUJET.


C’est la fureur despotique qui a établi que la disgrâce du père entraîneroit celle des enfants et des femmes. Ils sont déjà malheureux sans être criminels ; et, d’ailleurs, il faut que le prince laisse entre l’accusé et lui des suppliants pour adoucir son courroux, ou pour éclairer sa justice.

C’est une bonne coutume des Maldives [1], que lorsque un seigneur est disgracié, il va tous les jours faire sa cour au roi, jusqu’à ce qu’il rentre en grâce ; sa présence désarme le courroux du prince.

Il y a des États despotiques [2] où l’on pense que de parler à un prince pour un disgracié, c’est manquer au respect qui lui est dû. Ces princes semblent faire tous leurs efforts pour se priver de la vertu de clémence.

Arcadius et Honorius, dans la loi [3] dont j’ai tant parlé [4], déclarent qu’ils ne feront point de grâce à ceux qui oseront les supplier pour les coupables. Celte loi étoit bien

  1. Voyez François Pirard. (M.)
  2. Comme aujourd'hui en Perse, au rapport de M. Chardin. Cet usage est bien ancien, « On mit Cavade, dit Procope, dans le château de l’oubli. Il y a une loi qui défend de parler de ceux qui y sont enfermés, et même de prononcer leur nom. » (M.)
  3. La loi 5, au Cod. ad leg. Jul, maj. (M.)
  4. Au chapitre VIII de ce livre. (M.)