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LIVRE XII, CHAP. XVIII.


des plus proches parents [1] Ils chassèrent une infinité de familles. Leurs républiques en furent ébranlées ; l’exil ou le retour des exilés furent toujours des époques qui marquèrent le changement de la constitution.

Les Romains furent plus sages. Lorsque Cassius fut condamné pour avoir aspiré à la tyrannie, on mit en question si l’on feroit mourir ses enfants : ils ne furent condamnés à aucune peine. « Ceux qui ont voulu, dit Denys d’Halicarnasse [2], changer cette loi à la fin de la guerre des Marses et de la guerre civile, et exclure des charges les enfants des proscrits par Sylla, sont bien criminels. »

On voit [3] dans les guerres de Marius et de Sylla jusqu’à quel point les ftmes chez les Romains s’étoient peu à peu dépravées. Des choses si funestes firent croire qu’on ne les reverroit plus. Mais sous les triumvirs on voulut être plus cruel et le paroître moins : on est désolé de voir les sophismes qu’employa la cruauté. On trouve dans Appien [4] la formule des proscriptions. Vous diriez qu’on n’y a d’autre objet que le bien de la république, tant on y parle de sang-froid, tant on y montre d’avantages, tant les moyens que l’on prend sont préférables à d’autres, tant les riches seront en sûreté, tant le bas peuple sera tranquille, tant on craint de mettre en danger la vie des citoyens , tant on veut apaiser les soldats, tant enfin on sera heureux [5].

  1. Tyranno occiso, quinque ejus proximos cognations, magistratus necato. Cicéron, de Inventione, lib, II, c. XXIX. (M.)
  2. Liv. VIII, p. 547. (M.)
  3. Ce paragraphe et le suivant ont été ajoutés aux dernières éditions, sauf les phrases : On trouve dans Appien, etc., jusqu'à la fin de l’alinéa.
  4. Des guerres civiles, liv. IV. (M.)
  5. Quod felix faustumque sit. (M.) A. B. « Tant on veut apaiser les soldats ; horrible exemple qui fait voir combien les grandes punitions sont près