Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t3.djvu/379

Cette page n’a pas encore été corrigée


CHAPITRE X.


DU TRIBUNAL DOMESTIQUE CHEZ LES ROMAINS.


Les Romains n’avoient pas, comme les Grecs, des magistrats particuliers qui eussent inspection sur la conduite des femmes. Les censeurs n’avoient l’œil sur elles que comme sur le reste de la république. L’institution du tribunal domestique [1] suppléa à la magistrature établie chez les Grecs [2].

Le mari assembloit les parents de la femme, et la jugeoit devant eux [3]. Ce tribunal maintenoit les mœurs dans la république. Mais ces mômes mœurs maintenoient ce tribunal. Il devoit juger non-seulement de la violation des lois, mais aussi de la violation des mœurs. Or, pour juger de la violation des mœurs, il faut en avoir.

Les peines de ce tribunal dévoient être arbitraires, et

  1. Romulus institua ce tribunal, comme il paroît par Denys d'HaIicarnasse, liv. II, p. 96. (M.)
  2. Voyez dans Tite-Live, liv. XXXIX, l'usage que l'on fit de ce tribunal lors de la conjuration des bacchanales : on appela conjuration contre la république, des assemblées où l'on corrompoit les mœurs des femmes et des jeunes gens. (M.)
  3. Il paroit par Denys d'Halicarnasse, liv. II, que par institution de Romulus, le mari, dans les cas ordinaires, jugeoit seul devant les parents de la femme ; et que, dans les grands crimes, il la jugeoit avec cinq d'entre eux. Aussi Ulpion, au titre VI, § 9, 12 et 13, distingue-t-il, dans les jugements des mœurs, celles qu'il appelle graves, d’avec celles qui l'étoient moins : mores graviores, mores leviores. (M.)