CHAPITRE XI.
Le gouvernement monarchique a un grand avantage sur le despotique. Comme il est de sa nature qu’il y ait sous le prince plusieurs ordres qui tiennent à la constitution, l'État est plus fixe, la constitution plus inébranlable, la personne de ceux qui gouvernent plus assurée.
Cicéron [2] croit que rétablissement des tribuns de Rome fut le salut de la république. « En effet, dit-il, la force du peuple qui n’a point de chef, est plus terrible. Un chef sent que l’affaire roule sur lui, il y pense ; mais le peuple, dans son impétuosité, ne connoit point le péril où il se jette. » On peut appliquer cette réflexion à un État despotique, qui est un peuple sans tribuns ; et à une monarchie, où le peuple a, en quelque façon, des tribuns [3].
En effet, on voit partout que, dans les mouvements du gouvernement despotique, le peuple, mené par lui-même,
- ↑ Dans ce chapitre il n’est question que de la monarchie française.
- ↑ Liv. III des lois, chap. X. Nimia potestas est tribunorum plebis ? — — Quis negat ? Sed vis populi multo sœvior multoque vehementior, quœ, ducem quod habet, interdum lenior est quam si nullum haberet. Dux enim suo se periculo progredi cogitat ; populi impetus periculi notionem sui non habet. (M.) — Le secret du gouvernement parlementaire est dans cette vérité d’observation que défend Cicéron.
- ↑ Ces tribuns, dans la monarchie française, étaient les Parlements, plus remuants que redoutables.