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LIVRE V, CHAP. VIII.


bonne heure à payer leurs dettes. Pour modérer leurs richesses, il faut des dispositions sages et insensibles ; non pas des confiscations, des lois agraires, des abolitions de dettes [1], qui font des maux infinis.

Les lois doivent ôter le droit d’ainesse entre les nobles [2], afin que, par le partage continuel des successions, les fortunes se remettent toujours dans l’égalité.

Il ne faut point de substitutions, de retraits lignagers, de majorats, d’adoptions. Tous les moyens inventés pour perpétuer la grandeur des familles dans les États monarchiques, ne sauroient être d’usage dans l’aristocratie [3].

Quand les lois ont égalisé les familles, il leur reste à maintenir l’union entre elles. Les différends des nobles doivent être promptement décidés ; sans cela, les contestations entre les personnes deviennent des contestations entre les familles. Des arbitres peuvent terminer les procès, ou les empêcher de naître.

Enfin, il ne faut point que les lois favorisent les distinctions que la vanité met entre les familles, sous prétexte qu’elles sont plus nobles ou plus anciennes ; cela doit être mis au rang des petitesses des particuliers.

On n’a qu’à jeter les yeux sur Lacédémone ; on verra comment les éphores surent mortifier les foiblesses des rois, celles des grands et celles du peuple.

  1. A. Ni des lois agraires, ni des abolitions de dettes, qui, etc.
  2. Cela est ainsi établi à Venise. Amelot de la Houssaye, p.30 et 31. (M.)
  3. Il semble que l’objet de quelques aristocraties soit moins de maintenir l'État, que ce qu'elles appellent leur Noblesse. (M.)
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