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LIVRE V, CHAP. V.


que les biens restassent dans la famille du testateur [1]. Il contredisoit les siennes propres ; car, en supprimant les dettes, il avoit cherché l’égalité.

C’étoit une bonne loi pour la démocratie, que celle qui défendoît d’avoir deux hérédités [2]. Elle prenoit son origine du partage égal des terres et des portions données à chaque citoyen. La loi n’avoit pas voulu qu’un seul homme eût plusieurs portions.

La loi qui ordonnoit que le plus proche parent épousât l’héritière, naissoit d’une source pareille. Elle est donnée chez les Juifs après un pareil partage. Platon [3], qui fonde ses lois sur ce partage, la donne de même ; et c’étoit une loi athénienne.

Il y avoit à Athènes une loi, dont je ne sache pas que personne ait connu l’esprit. Il étoit permis d’épouser sa sœur consanguine, et non pas sa sœur utérine [4]. Cet usage tiroit son origine des républiques, dont l’esprit étoit de ne pas mettre sur la même tête deux portions de fonds de terre, et par conséquent deux hérédités. Quand un homme épousoit sa sœur du côté du père, il ne pouvoit avoir qu’une hérédité, qui étoit celle de son père : mais, quand il épousoit sa sœur utérine, il pourroit arriver que le père

  1. Plutarque, Vie de Solon. (M.)
  2. Philolaûs de Corinthe établit à Athènes [lisez : à Thèbes] que le nombre des portions de terre et celui des hérédités seroit toujours le même. (ARISTOTE, Politique, liv. II, chap. XII. (M.)
  3. République, liv. VIII. (M.) Lois, liv. XI.
  4. Cornélius Nepos, in prœfat, [Neque enim Cimoni fuit turpe, Athéniensium summo viro, sororem germanam habere in matrimonio, quippe quum cives ejus eodem uterentur instituto, At id quidem nostris moribus nefas habetur]. Cet usage étoit des premiers temps. Aussi Abraham dit-il de Sara : Elle est ma sœur, fille de mon père, et non de ma mère, [Genèse, chap. XX]. Les mêmes raisons avoient fait établir une même loi chez différents peuples. (M.)