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ANALYSE RAISONNÉE

D’ailleurs, les empereurs, dans la suite, les énervèrent par les priviléges des droits de maris, d’enfants, de trois enfants, par la dispense des peines. On donna le privilége des maris aux soldats. Auguste fut exempté des lois qui limitoient la faculté d’affranchir, et de celle qui bornoit la faculté de léguer.

Les sectes de philosophie introduisirent un esprit d’éloignement pour les affaires. Ces fatales semences produisirent l’éloignement pour les soins d’une famille, et par conséquent la destruction de l’espèce humaine.

Les lois de Constantin ôtèrent les peines des lois pappiennes, et exemptèrent tant ceux qui n’étoient point mariés que ceux qui, étant mariés, n’avoient point d’enfants.

Théodose le jeune abrogea les lois décimaires, qui donnoient une plus grande extension aux dons que le mari et la femme pouvoient se faire à proportion du nombre des enfants, comme on l’a remarqué ci-dessus.

Justinien déclara valables tous les mariages que les lois pappiennes avoient défendus.

Par les lois anciennes, la faculté naturelle que chacun a de se marier et d’avoir des enfants ne pouvoit être ôtée. Ainsi la loi pappienne annuloit la condition de ne se point marier apposée à un legs, et le serment de ne se point marier et de n’avoir point d’enfants, que le patron faisoit faire à son affranchi ; mais on vit émaner des constitutions des empereurs des clauses qui contredisent ce droit ancien.

Il n’y a point une loi expresse qui abroge les priviléges et les honneurs que les lois anciennes accordoient aux mariages et au nombre des enfants ; mais depuis qu’on accorda, comme firent les lois de Justinien, des avantages à ceux qui ne se remarioient pas, il ne pouvoit plus y avoir des privilèges et des honneurs pour le mariage. Ici notre auteur, rendant hommage au célibat qui a pour motif la religion, déplore amèrement le célibat introduit par le libertinage, qui fait qu’une infinité de gens riches et voluptueux fuient le mariage pour la commodité de leurs déréglements.