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LE TEMPLE DE GNIDE.


Tandis qu’elle était seule, on la prit pour Vénus ;
Diane avec Vénus n’était plus que Diane.

Gnide, pendant ces jeux, présentait l’univers :
On eût dit que l’Amour, pour un jour de conquête,
Rassemblait des attraits de cent climats divers ;
Jamais on n’avait vu de si pompeuse fête.
La nature aux humains partage la beauté,
Comme elle est assortie à chaque déité.
Partout on retrouvait, d’espaces en espaces,
Ou Pallas, ou Thétis, la grandeur de Junon,
Ou la simplicité de la sœur d’Apollon,
Le souris de Vénus, ou le charme des Grâces.
La Pudeur, dans son air, variait tour à tour,
Et semblait se jouer de ce peuple folâtre :
Ici, l’œil s’arrêtait sur deux globes d’albâtre ;
Et plus loin, sur un pied façonné par l’amour.

Mais les dieux immortels, ravis de ma Thémire,
En voyant leur ouvrage, aiment à lui sourire ;
Vénus avec plaisir contemple ses appas :
C’est l’unique beauté, dans le céleste empire,
Que d’un jaloux dépit les dieux ne raillent pas.

Comme parmi les fleurs qui se cachent dans l’herbe,
La rose avec éclat lève son front superbe,
On vit sur tant d’attraits mon amante régner.
Ses rivales à peine eurent le temps de l’être :
Leur foule était vaincue avant de la connaître.
Grâces, dit la déesse, allez la couronner ;
De mille objets charmants que le cirque rassemble,
Voilà, dans sa beauté, le seul qui vous ressemble.

Tandis qu’avec ses sœurs, aux autels de Vénus,
Thémire triomphante est encore arrêtée,
Je trouve dans un bois le sensible Aristée,
Je l’avais vu dans l’antre, et je le reconnus.
Nous fûmes attirés par un charme rapide :