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DANS LA RELIGION.


morale dont elle manquait ; mais les législateurs des Romains étaient trop clairvoyants pour ne point connaître combien une pareille réformation eût été dangereuse : c’eût été convenir que la religion était défectueuse ; c’était lui donner des âges[1], et affaiblir son autorité en voulant l’établir. La sagesse des Romains leur fit prendre un meilleur parti en établissant de nouvelles lois. Les institutions humaines peuvent bien changer, mais les divines doivent être immuables comme les dieux mêmes.

Ainsi le sénat de Rome, ayant chargé le préteur Pétilius[2] d’examiner les écrits du roi Numa, qui avaient été trouvés dans un coffre de pierre, quatre cents ans après la mort de ce roi, résolut de les faire brûler, sur le rapport que lui fit ce préteur que les cérémonies qui étaient ordonnées dans ces écrits différaient beaucoup de celles qui se pratiquaient alors ; ce qui pouvait jeter des scrupules dans l’esprit des simples, et leur faire voir que le culte prescrit n’était pas le même que celui qui avait été institué par les premiers législateurs, et inspiré par la nymphe Égérie.

On portait la prudence plus loin : on ne pouvait lire les livres sibyllins sans la permission du sénat, qui ne la donnait même que dans les grandes occasions, et lorsqu’il s’agissait de consoler les peuples. Toutes les interprétations étaient défendues ; ces livres mêmes étaient toujours renfermés ; et, par une précaution si sage, on ôtait les armes des mains des fanatiques et des séditieux.

Les devins[3] ne pouvaient rien prononcer sur les

  1. Lettres persanes, lettre LX.
  2. Tite-Live, liv. XL, chap. XXIX. (M.)
  3. Les aruspices.