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CHAPITRE XVII.


CHANGEMENT DANS L’ÉTAT.


Pour prévenir les trahisons continuelles des soldats, les empereurs s’associèrent des personnes en qui ils avaient confiance, et Dioclétien, sous prétexte de la grandeur des affaires, régla qu’il y aurait toujours deux empereurs et deux Césars. Il jugea que, les quatre principales armées étant occupées par ceux qui auraient part à l’empire, elles s’intimideraient les unes les autres ; que les autres armées, n’étant pas assez fortes pour entreprendre de faire leur chef empereur, elles perdraient peu à peu la coutume d’élire ; et qu’enfin, la dignité de César étant toujours subordonnée, la puissance, partagée entre quatre pour la sûreté du gouvernement, ne serait pourtant, dans toute son étendue, qu’entre les mains de deux.

Mais ce qui contint encore plus les gens de guerre, c’est que, les richesses des particuliers et la fortune publique ayant diminué, les Empereurs ne purent plus leur faire des dons si considérables ; de manière que la récompense ne fût plus proportionnée au danger de faire une nouvelle élection.

D’ailleurs, les préfets du prétoire, qui, pour le pouvoir et pour les fonctions, étaient, à peu près, comme les grands vizirs de ces temps-là et faisaient à leur gré massacrer les empereurs pour se mettre en leur place, furent fort