qu’il lui plairait. Cela fit qu’il ne se défia point du Sénat, et qu’il y fut assassiné ; mais cela fit aussi que, dans les règnes suivants, il n’y eut point de flatterie qui fût sans exemple, et qui pût révolter les esprits.
Avant que Rome fût gouvernée par un seul, les richesses des principaux Romains étaient immenses, quelles que fussent les voies qu’ils employaient pour les acquérir. Elles furent presque toutes ôtées sous les Empereurs[1]: les sénateurs n’avaient plus ces grands clients qui les comblaient de biens ; on ne pouvait guère rien prendre dans les provinces que pour César, surtout lorsque ses procurateurs, qui étaient à peu près comme sont aujourd’hui nos intendants, y furent établis. Cependant, quoique la source des richesses fût coupée, les dépenses subsistaient toujours, le train de vie était pris, et on ne pouvait plus le soutenir que par la faveur de l’Empereur.
Auguste avait ôté au peuple la puissance de faire des lois et celle de juger les crimes publics ; mais il lui avait laissé ou, du moins, avait paru lui laisser celle d’élire les magistrats. Tibère, qui craignait les assemblées d’un peuple si nombreux, lui ôta encore ce privilège et le donna au Sénat, c’est-à-dire à lui-même[2] : or on ne saurait croire combien cette décadence du pouvoir du peuple avilit l’âme des Grands. Lorsque le peuple disposait des dignités, les magistrats qui les briguaient faisaient bien des bassesses ; mais elles étaient jointes à une certaine magnificence qui les cachait, soit qu’ils donnassent des jeux ou de certains
- ↑ A. met ici cette note : Les grands de Rome étaient déjà pauvres du temps d’Auguste ; on ne voulait plus être édile ni tribun du peuple ; beaucoup même ne se souciaient pas d’êtres sénateurs. (Édition de 1734). (M.)
- ↑ Tacite, Annal., liv. I, ch. XV. Dion, liv. LIV. (M.) A. ajoute : Caligula rétablit les comices, et les ôta ensuite. (M.). (M.)