déric que pour éclaircir le texte de Montesquieu. Par exemple,
l’auteur nous dit au chapitre V :
« Les rois de Macédoine étoient ordinairement des princes habiles. Leur monarchie n’étoit pas du nombre de celles qui vont par une espèce d’allure donnée dans le commencement. Continuellement instruits par les périls et par les affaires, embarrassés dans tous les démêlés des Grecs, il leur falloit gagner les principaux des villes, éblouir les peuples, diviser ou réunir les intérêts ; enfin ils étoient obligés de payer de leur personne à chaque instant. »
Rien de plus vrai que cette peinture : elle frappe tous ceux qui ont étudié l’histoire ancienne ; mais le coup a porté plus loin et Frédéric se reconnaît dans ce tableau.
« Ces rois de Macédoine, dit-il, étoient ce qu’est un roi de Prusse et un roi de Sardaigne de nos jours. »
Si Montesquieu écrit avec grande raison : « César pardonna à tout le monde ; mais il me semble que la modération que l’on montre après qu’on a tout usurpé, ne mérite pas de grandes louanges[1] ; Frédéric proteste :
« Ceci est d’un critique outré. Sylla n’en usa pas avec autant de modération que César ; une âme basse qui auroit pu se venger l’auroit pourtant fait. Mais César ne sait que pardonner. Il est toujours beau de pardonner, quand même on n’a plus rien à craindre. »
Sans doute il est beau de pardonner… à des coupables. Mais pardonner à ceux dont on a égorgé les enfants, à ceux qu’on a dépouillés, ruinés, asservis le fer à la main, en violant toutes les lois et tous les serments, c’est un genre de clémence à l’usage des conquérants ; il ne faut pas demander aux victimes de le comprendre, ni aux honnêtes gens de l’admirer.
Les Considérations sur les causes de la grandeur et de la décadence des Romains faisant partie des livres classiques qu’on met entre les mains de la jeunesse, on les a souvent annotées dans ces derniers temps. De savants professeurs, des littérateurs émé-
- ↑ Considérations, ch. XI.