Page:Montesquieu - Œuvres complètes, éd. Laboulaye, t2.djvu/102

Cette page n’a pas encore été corrigée
86
LE TEMPLE DE GNIDE.


Mais elle avait cet air que donne la nature,
Cet air dont le secret n’est point connu de l’art.
Elle sourit : Tu vois la seconde des Grâces,
Dit-elle avec un ton qui passait jusqu’au cœur :
Vénus t’appelle à Gnide, et fera ton bonheur.
Elle fuit dans les airs : mes yeux suivent ses traces ;
Je me lève, enflammé de plaisir et d’espoir :
Comme une ombre légère elle était disparue ;
Et le transport divin que me causait sa vue
Bientôt cède au regret de ne la plus revoir.

Je respirai l’amour en arrivant à Gnide ;
Mais ce que je sentais, je ne puis l’exprimer :
Mon cœur se pénétrait d’une flamme rapide ;
Je n’aimais pas encor, mais je brûlais d’aimer.
Je m’avançai ; je vis des nymphes enfantines
Jouer innocemment dans les plaines voisines ;
Je me précipitai vers ces jeunes appas :
Insensé ! m’écriai-je, où s’égarent mes pas ?
Quel trouble me saisit ? d’où vient que je soupire ?
J’éprouve, sans aimer, l’ivresse de Vénus !
Mon cœur déjà poursuit des objets inconnus !
Tout à coup j’aperçus la charmante Thémire ;
Je ne regardai qu’elle, et j’expirais, je croi,
Si ses regards flatteurs n’étaient tombés sur moi.
Je courus à Vénus : Écoute ma prière,
Lui dis-je, et puisqu’ici tu dois me rendre heureux,
Ordonne que ce soit avec cette bergère !
Seule, elle peut remplir ta promesse et mes vœux.


FIN DU SECOND CHANT.