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LETTRES PERSANES.


hommes beaucoup plus mauvais qu’ils ne sont. L’amour fait retentir ce tribunal ; on n’y entend parler que de pères irrités, de filles abusées, d’amants infidèles, et de maris chagrins.

Par la loi qui y est observée, tout enfant né pendant le mariage, est censé être au mari ; il a beau avoir de bonnes raisons pour ne le pas croire, la loi le croit pour lui, et le soulage de l’examen et des scrupules. [1]

Dans ce tribunal, on prend les voix à la majeure [2] ; mais on dit qu’on a reconnu, par expérience, qu’il vaudrait mieux les recueillir à la mineure ; et cela est assez naturel ; car il y a très-peu d’esprits justes, et tout le monde convient qu’il y en a une infinité de faux.

De Paris, le 1 de la lune de gemmadi 2, 1715.

  1. « La loi Pater is est quem nuptiœ demonstrant est le triomphe des femmes galantes et la honte des pauvres maris. Avec cette loi, on donnera des enfants à qui on voudra, et à qui n’en aura point fait. » Mathieu Marais, t. II, p. 99.
  2. C’est-à-dire on juge à la majorité des voix.