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LETTRE XLVII.


LETTRE XLVII.

ZACHI À USBEK.


à paris.


J’ai une grande nouvelle à t’apprendre : je me suis réconciliée avec Zéphis ; le sérail, partagé entre nous, s’est réuni. Il ne manque que toi dans ces lieux, où la paix règne : viens, mon cher Usbek, viens y faire triompher l’amour.

Je donnai à Zéphis un grand festin, où ta mère, tes femmes et tes principales concubines furent invitées ; tes tantes et plusieurs de tes cousines s’y trouvèrent aussi ; elles étaient venues à cheval, couvertes du sombre nuage de leurs voiles et de leurs habits.

Le lendemain, nous partîmes pour la campagne, où nous espérions être plus libres : nous montâmes sur nos chameaux, et nous nous mîmes quatre dans chaque loge. Comme la partie avait été faite brusquement, nous n’eûmes pas le temps d’envoyer à la ronde annoncer le courouc :[1] mais le premier eunuque, toujours industrieux, prit une

  1. Courouc (arrière, arrière), est le cri que poussent les eunuques qui accompagnent les litières où sont les femmes. Et c’est à coups de bâton qu’ils écartent les curieux et les indiscrets. V. sup., lettre XXVI.