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LETTRES PERSANES.
LETTRE XXXVII.
USBEK A IBBEN.
A SMYRNE.
Le roi de France est vieux. [1] Nous n’avons point d’exemple, dans nos histoires, d’un monarque qui ait si longtemps régné. On dit qu’il possède à un très-haut degré le talent de se faire obéir : il gouverne avec le même génie sa famille, sa cour, son État ; on lui a souvent entendu dire que, de tous les gouvernements du monde, celui des Turcs, ou celui de notre auguste sultan, lui plairait le mieux ; tant il fait cas de la politique orientale. [2]
J’ai étudié son caractère, et j’y ai trouvé des contradictions qu’il m’est impossible de résoudre : par exemple, il a un ministre qui n’a que dix-huit ans, [3] et une maîtresse
- ↑ Louis XIV. Il avait alors soixante-quinze ans, et régnait depuis soixante-dix ans.
- ↑ Des courtisans s’entretenaient devant Louis XIV, qui n’avait alors que quinze ans, du pouvoir absolu des sultans, qui disposent des biens et de la vie de leurs sujets : « Voilà, dit le jeune roi, ce qui s’appelle régner. » Le maréchal d’Estrées, effrayé des dispositions que promettait un semblable aveu, repartit : « Mais, sire, deux ou trois de ces empereurs ont été étranglés de mon temps. » (Note de l’édition Dalibon, Paris, 1826.)
- ↑ Quel est ce ministre ? Barbézieux, fils de Louvois, que citent les commentateurs, était ministre à vingt-trois ans, et non à dix huit. De plus, il était mort en 1713.