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DANS LES RUES

Pépé arriva sur les quais facilement, mais comme il enfilait le pont, une grosse pluie froide commença à tomber et elle devint torrentielle. En quelques minutes, le pauvre petit Pépé fut entièrement traversé. Il chercha un refuge sous une porte et se butta contre un gardien de la paix qui y était venu demander, lui aussi, un abri. Pépé eut peur d’être reconnu et repris, et il courut plus loin. La pluie augmenta encore. Il vit de grosses conduites à gaz déposées sur la voie publique, il se glissa dans l’une d’elles et resta là, transi de froid, mouillé jusqu’aux os, entendant la pluie sonner sur l’énorme tube dans lequel il était comme si on avait projeté des cailloux contre sa paroi.

— C’est bien maintenant, pensa-t-il, que je n’oserai pas frapper à la porte de Mme Giraud. Fuyant les voleurs et les gendarmes, malpropre et mouillé, de qui aurais-je l’air ? Les domestiques de Mme Giraud me jetteraient à la porte sans me laisser voir leurs maîtres.

La pluie continua la journée entière. Il n’osa pas sortir de son tuyau.

— Où irai-je ? se demanda-t-il. Où irai-je, si je sors ? Per­sonne ne voudra de moi, je ne puis m’adresser à personne. Le pauvre petit Pépé va rester là dedans. C’était la destinée du pauvre petit Pépé de demeurer un pauvre petit perdu. On l’a trouvé dans la neige, abandonné dans la rue, il mourra aban­donné dans la rue.

La nuit vint, et la pluie continuait toujours, et, tout mouillé, tout grelottant, le pauvre petit Pépé, qui n’avait pas fermé les