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HISTOIRE DU CÉLÈBRE PÉPÉ

plus vite, toujours seul, au sortir de l’atelier, il demeura pour ainsi dire inconnu jusqu’à la fête de Montmartre.

Les forains se retrouvaient sur le boulevard Rochechouart et le cirque Alcindor à la même place, place qui rappelait au jeune artiste une bonne et heureuse journée puisqu’elle avait marqué la fin des maux du pauvre petit perdu. Il était connu et aimé de cette population foraine qui comprenait six à sept mille personnes et, en se promenant au milieu des baraques, il voyait ses œuvres pour ainsi dire exposées autour de lui, chez le dompteur Totor comme chez la somnambule.

Ses œuvres ! À présent qu’il savait peindre, il souriait en les regardant.

— Était-ce naïf ! pensait-il. Mais quel effet !… C’est vrai, je ne réussirais pas si bien aujourd’hui.

Et il allait travailler au grand art, chez Cabrion.

— Qu’est-ce que mes camarades peuvent avoir ? se demandait-il.

Depuis quelques jours, ils chuchotaient dans les coins, en dehors de lui. On appelait Cabrion, on lui soufflait bas, à l’oreille, et Cabrion jetait des regards dérobés et inquisiteurs sur Pépé.

— Est-ce moi qui les occupe ? se demandait Pépé.

Il n’en pouvait guère douter, mais pour quelle cause ? Encore quelque excellente farce, sans doute.

Un soir, comme Gig lui lançait le trapèze, il aperçut une tête qu’il connaissait et qu’il était impossible de confondre dans la foule, c’était celle de Cabrion.

— Cette fois, pensa-t-il, je suis reconnu. Ce qui m’étonne,