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JOURNAL DU MARQUIS DE MONTCALM

potes dans le printemps, des noix appelées noix de Niagara, qui ne sont pas plus grosses que des noisettes, une coque très vive, et en dedans un fruit qui a le goût de la noix de France, mais moins bonne.

La côte depuis l’endroit où j’ai débarqué jusqu’à Québec, m’a paru bien cultivée, les paysans très à leur aise, vivant comme des petits gentilshommes de France, ayant chacun deux ou trois arpents de terre sur trente de profondeur. Les habitations ne sont pas contiguës, chaque habitant ayant voulu avoir son domaine à portée de sa maison. De les avoir contiguës auroit été plus avantageux pour la défense du pays, la cour l’eût désiré, elle l’a ordonné plusieurs fois ; mais les habitants ont toujours préféré leurs commodités. Les gouverneurs généraux ont toujours été d’avis différents. M. de la Galissonnière a été le dernier qui ait eu à cœur de rendre les habitations contiguës. Le Canada doit être un bon pays pour y vivre à bon marché en temps de paix mais tout est hors de prix depuis la guerre. Les marchandises qu’on tire de France viennent difficilement ; et comme tout habitant est milicien, et qu’on en tire beaucoup pour aller à la guerre, le peu qui reste ne suffit pas pour cultiver les terres, élever les bestiaux et aller à la chasse, ce qui occasionne une grande rareté et cherté pour la vie.

Le seul gouvernement de Québec a fait marcher depuis le premier de mai trois mille miliciens, dont dix-neuf cents guerriers et onze cents hommes pour le service ; et le Roi qui ne leur donne aucune solde, est obligé de les nourrir. À l’égard des sauvages, ils coûtent encore plus car on leur donne des habillements, des