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JOURNAL DU MARQUIS DE MONTCALM

Du 11 avril 1756. — Nous avons eu quasi un calme cette nuit ; cependant notre estime a été de vingt-quatre lieues.

Du 12 avril 1756. — Notre estime a été de cinquante lieues. Il y a eu sur les quatre heures un grain de vent suivi d’une espèce de tempête qui nous a obligés de mettre à la cape et d’y rester toute la nuit ; ce gros temps nous a fort fatigués et rendus presque tous malades. Je ne conseille à personne de naviguer pour son plaisir.

Du 13 avril 1756. — Notre estime n’a été que de vingt lieues. Les vents ont molli la mer a été agitée sur le midi ; et je puis assurer que, soit que la mer soit tranquille ou agitée, ce n’est un beau coup d’œil que dans les décorations d’opéra. C’est le plus triste et le plus uniforme que je connoisse quand elle est calme, et le plus effroyable quand elle est agitée. Aussi, est-ce la voiture la moins à préférer, d’autant qu’on ne va pas toujours sur mer via della posta. On est souvent contrarié par les vents et incommodé d’un roulis seul capable d’ôter l’envie de faire beaucoup de voyages par mer. Pendant les gros temps, on ne sait comment se tenir, comment manger, comment dormir ; on est obligé de faire amarrer toutes choses et, si on osoit, on seroit tenté de se faire amarrer soi-même. Ce roulis agite et fatigue le corps, et contribue beaucoup à la mauvaise disposition où l’on se trouve quasi toujours ; car les personnes qui paroissent se mieux porter sur mer ne sont pas dans leur assiette ordinaire. Aussi il n’y a que ceux qui n’y ont pas été qui s’imaginent qu’on peut s’y occuper à des études suivies et sérieuses.