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démêlés du comte de montaigu

de Montaigu : « Je fus obligé de chasser un misérable qui avoit esté à M. de Froulay. » Le sens de cette phrase n’apparaît clairement que si on la rapproche du tableau que Jean-Jacques nous a fait de l’hôtel de l’ambassadeur. Dans ce repaire de « masquereaux », de « fripons » et de « débauchés » il n’y avait « qu’un seul refuge honnête », et encore n’était-il pas à l’abri de tout soupçon. Ce qui veut dire en bon français que les mœurs de l’ambassadeur laissaient à désirer. Cette accusation ne peut être qu’une plaisanterie de la part de Jean-Jacques. Il savait bien, il le dit dans ses Confessions, que l’ambassadeur vivait familièrement avec ses collègues étrangers et leur entourage[1] ; bien plus, avec le duc et les princesses de Modène : celles-ci eussent-elles admis dans leur cour un homme de mauvaises mœurs ? La correspondance de l’ambassadeur est toute en sa faveur[2]. Il y apparaît comme un excellent père ne désirant qu’une chose : se voir entourer de sa femme et de ses enfants[3].

  1. Voir p. 30.
  2. L’ambassadeur n’était pas comme son secrétaire, qui n’avait guère de respect pour les femmes ; il a traité la fameuse Barbarine de légère mémoire avec une cérémonieuse gravité. Dans une lettre à Amelot, du 25 janvier 1744, il raconte qu’ayant promis ses bons offices à l’agent du roi de Prusse pour décider la danseuse à remplir son engagement, il l’a invitée à dîner, de même que l’ambassadeur d’Espagne, « pour donner plus de poids à nos discours ».
  3. M. de Montaigu, étant arrivé à Venise en octobre 1744, resta seul pendant environ quinze mois, ce qui lui parut long, comme le prouvent ses lettres.