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ET DE JEAN-JACQUES ROUSSEAU


personnel n’avaient aucun rapport avec l’aristocratie vénitienne. C’était un préjugé très ancien, que ni le comte de Montaigu ni Rousseau ne pouvaient se flatter de faire disparaître. Il est matériellement faux que les intérêts français à Venise eussent été en souffrance sans l’initiative du secrétaire de l’ambassadeur.

À l’appui de son dire, Rousseau cite deux actes essentiels. C’est d’abord son heureuse intervention auprès de Véronèse. Dans l’exposition de cette affaire Jean-Jacques commet une légère erreur. Véronèse avait bien donné un acompte sur la somme totale, de telle façon qu’il ne lui était plus réclamé que 1,400 francs ; mais la question importante est de savoir si Rousseau, sans aucune instruction du comte de Montaigu, et de son autoritée privée, était allé trouver en bahute et en masque le noble Zustiniani, et l’avait tancé si vertement qu’au bout d’une semaine Véronèse eut quitté Venise. Les Giustiniani (Zustiniani, en dialecte vénitien) étaient propriétaires du théâtre de San Mosé, et non de celui de Saint-Samuel ou de Saint-Luc[1].

La correspondance de l’ambassadeur contient la minute de la réponse qu’il adresse lui-même au duc de Gesvres, le 7 décembre, au sujet de cette affaire. Le comte de Montaigu envoya Rousseau en masque, non pas chez le propriétaire du théâtre, mais chez

  1. M. Ceserole, ouvrage cité, p. 135. — Ceserole avait déjà relevé le fait et contredit cette anecdote, ouvrage cité.