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COMTE DE MONTAIGU ET JEAN-JACQUES ROUSSEAU

des ménagements à garder, qui l’empêchaient de faire ce qu’il aurait voulu. Quelquefois cependant, le voyant mollir et n’oser parler, je m’aventurais à des démarches hasardeuses dont plusieurs m’ont réussi. Je m’en rappelle une dont le souvenir me fait encore rire. On ne se douterait guère que c’est à moi que les amateurs du spectacle à Paris ont dû Coralline et sa sœur Camille : rien cependant n’est plus vrai. Véronèse, leur père, s’était engagé avec ses enfants pour la troupe italienne, et après avoir reçu deux mille francs pour son voyage, au lieu de partir, il s’était mis à Venise au théâtre de Saint-Luc, où Coralline, tout enfant qu’elle était encore, attirait beaucoup de monde. M. le duc de Gesvres, connue premier gentilhomme de la chambre, écrivit à l’ambassadeur pour réclamer le père et la fille. M. de Montaigu, me donnant la lettre, me dit pour toute instruction : « Voyez cela. » J’allai chez M. Le Blond le prier de parler au patricien à qui appartenait le théâtre de Saint-Luc et qui était, je crois, un Zustiniani, afin qu’il renvoyât Véronèse, qui était engagé au service du roi. Le Blond, qui ne se souciait pas trop de la commis-