Page:Montaigu - Démêlés du Comte de Montaigu, 1904.djvu/54

Cette page a été validée par deux contributeurs.

comprit vite qu’une action commune des représentants de la maison de Bourbon était nécessaire, ne fût-ce que pour faire croire au Sénat que l’entente des deux gouvernements et de leurs armées était complète.

Jean-Jacques aurait pu observer d’ailleurs que pour un ambassadeur inexpérimenté, aussi bien que pour un diplomate de carrière, il n’y avait pas alors d’autre moyen de prendre position[1].

Si les représentants des couronnes étaient, d’ordinaire, aimablement accueillis dans les cours européennes, à Venise, en revanche, on ne leur témoignait que de l’hostilité. On les honorait de fêtes brillantes[2], mais les nobles ne pouvaient avoir aucun commerce avec eux ; on ne les saluait pas[3], et pour les tenir à distance du siège du gouvernement on leur défendait de résider dans les environs de la place Saint-Marc. Voués ainsi à l’isolement, les ministres ignoraient à peu près toutes choses, et pour obtenir des nouvelles ils recouraient à des agents, quelquefois à des prêtres, moines ou reli-

  1. « Personne n’ayant plus envie de bien faire que moy, et de mériter vos bonnes grâces et votre protection. » (Lettre du comte de Montaigu à Amelot, 31 août 1743.)
  2. On aurait pu reproduire d’après un tableau de famille et une lettre de l’ambassadeur une de ces fêtes données au comte de Montaigu.
  3. « Pas un noble n’a de commerce avec les ambassadeurs ; cela est porté à un point qu’ils ne sont salués ni par les hommes ni par les femmes, et ne reçoivent nuls honneurs dans l’État de la République… » (Lettre sans date du comte de Montaigu à N.)