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DÉMÊLÉS DU COMTE DE MONTAIGU

Jean-Jacques, la seule tâche politique de l’ambassadeur était d’engager les Vénitiens à la neutralité. Malheureusement les ministres des affaires étrangères qui se succédèrent à Versailles de 1743 à 1748 ne partageaient pas ces vues ; ils auraient voulu une franche sympathie au lieu d’une simple indifférence, et ils refusaient de croire l’ambassadeur quand il parlait de cette neutralité[1].

Cependant les avis qu’il transmettait à Versailles n’avaient rien d’invraisemblable et concordaient avec ceux des diplomates qui connaissaient bien la République [2]. Cette défiance du ministère, blessante pour le comte de Montaigu, le mettait dans un singulier embarras ; il redoutait à chaque instant que le Sénat, devant les hésitations du roi de France, ne se jetât dans les bras de l’Autriche[3]. C’est justement pour avoir trop bien compris qu’il n’y avait

  1. Lettres du marquis d’Argenson à l’ambassadeur, 8 décembre, 9 et 16 mars 1745, etc.
  2. Le 2 novembre 1743, le marquis de Mari écrivait au prince de Campo Florido, ambassadeur d’Espagne à Versailles : « À l’égard de la République, elle n’a jusqu’ici rien fait qui ne soit conforme à une exacte neutralité. » Le maréchal de Belle-Isle, dans une lettre au comte de Montaigu (21 novembre 1745), exprime la conviction que les Vénitiens resteront neutres. Notre ministre de Florence, Lorenzi, écrivant à l’ambassadeur le 15 janvier 1746, lui annonce que, d’après ce que lui a révélé un noble Vénitien, la République gardera la neutralité, mais qu’il en serait autrement si le Mantouan était attaqué.
  3. Lettre de l’ambassadeur au marquis d’Argenson, 17 avril 1743 — Lettres de l’ambassadeur au roi, 2 janvier et 13 août 1746.