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DÉMÊLÉS DU COMTE DE MONTAIGU

Amelot, et de ses collègues tels que M. de Seneterre, ambassadeur à Turin, MM.  de Joinville, de l’Hôpital, de Castellane, prouve que le comte de Montaigu avait, à défaut d’expérience, un sens diplomatique juste et droit. Dès son entrée en fonctions il s’était fait une idée exacte des tendances de la république de Venise. Le 21 septembre 1743, il écrivait au ministre Amelot : « En général les inclinations nous sont contraires, et cela se voit par la froideur avec laquelle s’y débitent les nouvelles favorables[1], au lieu que les mauvaises s’y répandent et grossissent comme un torrent[2]. »

L’exemple venant d’en haut était suivi par le peuple, qui ne cachait pas ses opinions gallophobes. Plusieurs fois, les domestiques de l’ambassadeur furent insultés dans Venise[3] ; une scène incroyable

  1. Lettre de l’ambassadeur à Amelot, le 4 avril 1744.
  2. En effet, les Vénitiens apprirent avec plaisir, en avril 1744, la nouvelle, inexacte d’ailleurs, que la flotte française avait été battue dans la Méditerranée par l’amiral anglais. Notre succès à Fontenoy leur causa une sensible déconvenue (lettre du comte de Montaigu au marquis d’Argenson. 12 juin 1745 ; en juillet 1747, la défaite et la perte de l’escadre de M. de Jonquières furent accueillies par d’inconvenantes réjouissances (lettre de l’ambassadeur à M. de Puyzieulx, 15 juillet 1747).
  3. Le 19 octobre 1743, l’ambassadeur écrit à son collègue, le marquis de Mari, en le priant d’informer le procurateur Eino de l’insulte qui a été faite l’avant-veille « à un de mes valets de pied au port de Saint-Félix, par un gondolier du trajet nommé Pierre Fortuni, qui, refusant de le passer d’abord, le passa enfin, le traittant mal de paroles, me mettant et la nation en jeu dans ses discours insolens. Comme cela s’est passé publiquement, je désirerois une punition proportionnée à l’insulte. Je voudrois bien ne pas présenter au Sénat un mémoire pour une affaire de cette